La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

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Les choix de délibéré – 10 oct. 2017
| 10 Oct 2017

La mort aux trousses

Cauchemar ou bal des spectres, au delà des personnages du film de Visconti, ce sont bien des figures théâtrales qui revivent et meurent dans la mise en scène des Damnés par Ivo van Hove, que la Comédie-Française reprogramme cet automne. Van Hove n’est pas seulement doué pour les images et la dramaturgie, il sait aussi diriger les acteurs, venus briller dans ce « rituel de la mort ». RS (Lire la critique, Avignon 2016)

Les Damnés, d’après le scénario de Luchino Visconti, Nicola Badalucco et Enrico Medioli. Mise en scène Ivo van Hove, à la Comédie française, salle Richelieu (place Colette, Paris 1er), jusqu’au 10 décembre 2017

 

Oh la vache !

Dans un paysage cinématographique plutôt morne en cette rentrée, Petit Paysan, le premier long-métrage d’Hubert Charuel, est une divine surprise. N’attendez pas qu’il ait disparu de l’affiche pour découvrir ce film fin et sensible qui réussit – prouesse ! – à nous intéresser au sort d’un petit éleveur de vaches laitières. Comment Charuel a-t-il fait ? Eh bien c’est simple, et très compliqué à la fois :  il a choisi un point de vue (celui du héros de cette histoire), s’y est tenu, a collé à sa sèche réalité, n’a rien ajouté qui eût terni l’intégrité du propos et sa fluidité, et surtout il n’a pas pris son spectateur pour un idiot. On aurait aimé que 120 Battements par minute ait autant de sobriété. EL

Petit Paysan, de Hubert Charuel, avec Swann Arlaud. 1h30. Encore dans quelques salles à Paris et en province

 

Effets de surface

Barbara, de Mathieu Amalric, avec Mathieu Amalric, Jeanne Balibar, ...Sans doute le trio Amalric / Barbara / Balibar que placarde l’affiche ne peut-il faire qu’appeau aux nuées cinéphiles, et plus encore quand le biopic cède au méta-film : le tournage d’une actrice incarnant la chanteuse, ici interprétée par l’ex du cinéaste jouant lui-même son propre rôle. Sans doute le montage et l’image portent-ils la virtuosité jusqu’au vertige, si brillant jeu de reflets qu’on n’en démêlerait presque plus voix ou visage de la copie et de l’original. Sans doute (ré)entend-on avec bonheur les paroles, chantées ou pas, d’une icône à la grâce si singulière, tragique ou tendre ironie que module un timbre à nul autre pareil. Mais l’on préférerait qu’au lieu de s’auto-émerveiller sans cesse de la performance d’imitation, le film nous donne à saisir de quoi est faite cette grâce – hélas, nous n’en saurons rien. Faut-il que les critiques et les publics soient si fascinés des effets de surface pour que mérite tant d’éloges un portrait qui dit si peu de la personne/persona qu’elle prétend dépeindre ? Reste la petite réussite burlesque de l’autoportrait d’Amalric en Woody Allen français, aussi aveuglé par l’aura de Barbara que l’acteur-réalisateur par celle de son ancienne compagne, manifestement. TG

Barbara, de & avec Mathieu Amalric, avec Jeanne Balibar…

 

La Colombie à l’écran

Le 5e panorama du cinéma colombien en France met à l’honneur 28 films (14 longs métrages, 14 courts métrages) et deux expositions, qui dessinent une carte cinématographique de la Colombie, chaque film étant l’occasion d’une rencontre (les réalisateurs sont présents). Le nouveau cinéma colombien est riche, ce festival en est la preuve. CV

5e Panorama du Cinéma Colombien du 11 au 17 octobre à Paris, cinémas L’Arlequin (76 rue de Rennes, 75006 Paris) et Reflet Médicis (3 rue Champollion, 75005 Paris), ainsi que des séances en itinérance. Une table ronde consacrée au « Nouveau cinéma colombien / nouveau réalisme poétique » aura lieu le jeudi 12 octobre de 14h30 à 16h en salle D32 à La Sorbonne Nouvelle (13 rue Santeuil, 75005 Paris – Métro Censier Daubenton). 

 

Respectez-vous, révoltez-vous !

Jean-Christophe Brochier aime le rock et la révolution. Il entreprend de marier les deux dans un livre musicalement, politiquement, littérairement tonique : Petits remèdes à la dépression politique. Brochier, éditeur au Seuil, brosse aussi le portrait d’une génération, la sienne, dont l’histoire est « l’histoire de ceux qui n’ont pas fait la guerre (ni la révolution, ni rien du tout) ». Au moins cette génération-là sait-elle transmettre le goût de la révolte, ainsi qu’un peu de l’histoire des grandes utopies politiques, et c’est déjà beaucoup. Respectons-nous, révoltons-nous ! En d’autres termes, rebâtissons sur le champ de ruines de nos illusions et, surtout, de nos désillusions. EL

Petits remèdes à la dépression politique, de Jean-Christophe Brochier. Don Quichotte. 245 pages, 18 euros

 

De la Kabylie à la Normandie

La saison des grands prix littéraires s’en revient, et il serait bien injuste (mais la justice là-dedans…) que le dernier roman d’Alice Zeniter n’en décroche pas au moins un. L’Art de perdre, quatrième roman de Zeniter, raconte l’histoire d’une famille de harkis sur trois générations. On s’y engage un peu à reculons, mais on est rapidement happé par une écriture précise, légère et entraînante, qui sonne constamment juste. Et l’on en sort, cinq cents pages plus loin, impressionné par la qualité d’un texte romanesque non dénué d’humour et d’amour qui, de surcroît, nous apprend encore sur l’Algérie et l’émigration. EL 

L’Art de perdre, d’Alice Zeniter. Flammarion. 506 pages, 22 euros

 

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