La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

Surf de l’ornithorynque
| 31 Oct 2015

“Norvège : il s’évade de prison sur une planche de surf.”

Norvège, surf et prison sont trois mots qu’il semblait difficile de réunir dans une même phrase. C’était sans compter la soif de liberté d’un détenu de la prison-modèle de Bastoy, établissement implanté sur l’île du même nom dans le fjord d’Oslo. Le type s’est fait la belle en ramant avec une pelle de plage en plastique. On ne serait pas surpris d’apprendre qu’il avait pris ses précautions en enfilant une bouée-canard. Planche et pelle ont été retrouvées sur la côte ; si l’évadé a gardé la bouée, on devrait pouvoir le repérer assez vite.

Le plus étonnant est que ce garçon d’une vingtaine d’années ait eu envie de s’échapper d’une prison qui, de loin, a un petit air de colonie de vacances puisqu’on n’y trouve ni clôture ni barreaux et que ses locataires sont autorisés à sortir faire du vélo, fréquenter le cinéma local au milieu des touristes et même, apparemment, faire du surf. Mais sans doute vient-il un moment où même la plus belle île a épuisé ses charmes, d’autant que  le fjord d’Oslo n’est pas le meilleur spot du monde pour les surfeurs.

Ce fait-divers oxymorique permet de rêver à d’autres faits-divers tout aussi improbables, comme “Mali : un défilé de mode interrompu par une tempête de neige”, ou encore “Tokyo : le tournoi de pétanque dégénère en bagarre générale”. Mais l’imagination est presque de trop ici puisqu’il suffit de taper dans un moteur de recherche trois mots évoquant des univers très éloignés les uns et des autres pour pêcher des absurdités bien réelles. “Alligator-bière-Noël” retourne par exemple un “Conte de Noël : un habitant de la Floride a essayé de troquer un alligator contre un pack de douze bières”. Le “conte” s’est mal fini puisque le type a été inculpé pour capture illégale et recel d’animal sauvage. Et Noël là-dedans ? L’article était daté d’un 24 décembre.

Il y a peu, le chercheur anglais Peter Backus a calculé de manière fort rationnelle ses chances de trouver la femme de sa vie : il a utilisé l’équation de Drake, celle que l’astronome Francis Drake a élaborée en 1961 pour évaluer le nombre de civilisations intelligentes susceptibles d’exister dans notre chère galaxie, la Voie Lactée. Résultat : 26 partenaires potentielles (même âge, mêmes goûts, etc) dans tout le Royaume-Uni. C’est-à-dire que pour Backus, les chances de se marier étaient à peu près nulles, ou plus exactement étaient de 0,00034 %. Eh bien nous sommes heureux de vous annoncer que le chercheur a convolé trois petites années après avoir trompeté qu’il ne trouverait jamais l’âme-soeur.

Cette histoire, à côté de beaucoup d’autres, prouve que les mathématiques du fait-divers ne se tiennent pas dans l’espace des nombres rationnels. Et que le nietzschéen “Rien ne vaut. Il ne se passe rien. Et pourtant tout arrive” est vérifié à peu près tous les jours.

Plus difficile maintenant : “Fission nucléaire – Ornithorynque – Zimbabwe”…

Édouard Launet

Sciences du fait divers

[print_link]

0 commentaires

Dans la même catégorie

30 millions d’ennemis

“‘Ne tire pas !’ : les mots d’un perroquet pourraient être utilisés dans un procès pour meurtre.” Le perroquet gris du Gabon est réputé bavard, intelligent et sociable. Il réclame cependant beaucoup d’attention et une alimentation étudiée. Par ailleurs, évitez de tuer quelqu’un en sa présence car il pourrait cafter. C’est le cas de Bud, perroquet depuis bientôt vingt ans, qui ne cesse de répéter “Don’t fucking shoot !” depuis que son propriétaire a été abattu de plusieurs coups de revolver. L’animal répète aussi – en y mettant les intonations – un dialogue qui ressemble fort à une dispute conjugale. La femme de la victime est ainsi la principale suspecte, et son sort repose entre les mains d’un procureur  qui n’exclut pas de faire témoigner le perroquet.  (Lire l’article)

Comme une vache espagnole

Après une opération chirurgicale, un Italien se réveille en parlant français.”  Son cas a fait l’objet d’une étude publiée dans la revue Cortex où l’on découvre que l’homme parle un français très approximatif mais “avec un rythme rapide, en employant une intonation exagérée et en utilisant une prosodie de film faisant de lui la caricature d’un Français”. Tous les matins, au réveil, l’homme crie “Bonjour !” en ouvrant joyeusement les volets et se met à débiter des phrases dans la langue de Molière et Houellebecq devant sa famille désemparée. Cet Italien serait victime du syndrome de la langue étrangère. À ne pas confondre avec le syndrome de l’accent étranger, un peu plus fréquent. (Lire l’article)

Electroménager blanc, idées noires

Elle achète un congélateur et trouve un cadavre dedans.” Une Américaine de Caroline du nord rachète un congélateur à sa voisine qui s’apprête à déménager. Quelques jours plus tard, l’acheteuse ouvre l’appareil et découvre qu’il contient un cadavre, celui de la mère de la voisine. Ce sont des choses qui arrivent… En lisant le titre de cette dépêche de l’AFP, je me suis pris à rêver qu’il s’agissait d’un congélateur neuf, tout juste livré par un grand magasin d’électroménager. Il aurait été possible de tracer un parallèle avec le magnifique plan séquence qu’Alfred Hitchcock souhaitait glisser dans la Mort aux trousses. (Lire l’article)

Arts de la soupe et de la grimace

“La championne du monde de grimaces fait un malaise juste après la compétition.” Elle venait de quitter la scène après avoir été sacrée championne du monde de grimaces, dans la ville anglaise d’Egremont. Subitement Anne Woods s’est évanouie et a dû être hospitalisée. Elle est sortie de l’hôpital quelques heures plus tard. Peut-être y aura-t-il un suivi médical des athlètes à l’avenir. En revanche, il n’y aura pas de prochaine édition du championnat du monde de sauna. En 2010, sa onzième et dernière édition s’est soldée par la mort de l’un des deux finalistes et l’hospitalisation de l’autre dans un état grave. La vie du sportif de haut niveau, en toutes disciplines, n’est pas que fleurs et gloire. (Lire l’article)

Scène de ménage avec freezer

Une femme frappe son compagnon avec un steak.” C’est un dimanche après-midi morose en Louisiane, le ventilateur tourne, les marais grouillent de bruits étranges, Edith picole. Lorsqu’elle ouvre la porte du freezer pour y enfourner une nouvelle bouteille de Tequila Rose, cette femme de 47 ans s’aperçoit que son compagnon Jerry a rempli le frigo jusqu’à la gueule, au point que même une bouteille n’y entrera pas. En conséquence de quoi, Edith attrape un steak congelé et le lance de toutes ses forces sur Jerry. Il aura fallu plus d’un demi-siècle pour que l’attaque à la viande congelée passe de la fiction à la réalité. (Lire l’article)