Signes précurseurs de la fin du monde : chaque semaine, l’Apocalypse en cinquante leçons et chansons. Ou peut-être moins si elle survenait plus tôt que prévu.
Chaque semaine tombent des nouvelles dont on ne sait si elles sont bonnes ou mauvaises, mais qui laissent à penser qu’il se passe de bien drôles de choses sur cette planète et que cela pourrait mal finir. Ou finir en beauté.
— S’est échoué sur la côte des Célèbes, dans le sud-est de l’Indonésie, le cadavre d’un cachalot qui avait dans le ventre cent quinze gobelets en plastique, quatre bouteilles en plastique, vingt-cinq sacs en plastique et deux tongs. Ce cétacé s’était peut-être invité à un pot de départ. Pas impossible d’ailleurs que ce fut le sien. Mais pourquoi deux tongs ?
— Plus de sept mille foyers britanniques utilisent encore une vieille télé en noir et blanc. À tube cathodique bien évidemment. Soit leurs possesseurs ignorent qu’au Royaume-Uni les émissions en couleur ont commencé en juillet 1967 (à l’occasion du tournoi de tennis de Wimbledon), auquel cas ces personnes montrent une phénoménale imperméabilité tant aux nouvelles qu’à la nouveauté. Soit il se diffuse encore de nos jours, outre Manche, de mystérieuses émissions en noir et blanc que l’on ne peut vraiment apprécier que sur de vieux postes (comme certains aiment à écouter encore des vinyles sur de vieilles platines), auquel cas nous serions curieux de connaître la nature de ces émissions, leurs horaires de diffusion et le canal UHF sur lequel on peut les capter.
— Un Japonais de 35 ans vient d’épouser un hologramme, celui de la chanteuse virtuelle Hatsune Miku. « Je ne l’ai jamais trompée, j’ai toujours été amoureux d’elle, j’ai pensé à elle tous les jours », a déclaré le jeune époux. La jeune épouse n’a pu en dire autant.
— Un béluga a été repéré nageant au milieu de la Tamise. Ce cétacé-là n’est pas mort d’une indigestion de plastique, mais il n’avait rien à faire là, a priori. En 2006, une baleine était décédée après avoir remonté la Tamise jusqu’à Londres, malgré les efforts déployés pour la sauver. Le jour où l’on verra des requins sous le Pont-Neuf à Paris, cela voudra dire que les carottes sont cuites et archi-recuites. Cependant, moins de gens se jetteront des ponts pour en finir avec ce monde cruel.
— L’animal le plus vieux du monde est âgé de… 42 000 ans : c’est l’un de vers congelés dans le permafrost sibérien que des chercheurs viennent de ramener à la vie. Le ver s’est mis aussitôt en quête de nourriture. Pour un peu, il aurait demandé l’heure. Si des vers réussissent à survivre des dizaines de milliers d’années dans la glace, les microbes devraient faire encore bien mieux, et dans le tas quelques-uns pourraient nous réserver des surprises à la décongélation. Sans doute pas terribles.
— Un arbitre de foot anglais a été suspendu trois semaines pour avoir demandé aux capitaines de deux équipes de jouer à Pierre Feuille Ciseaux pour déterminer quel camp aurait le coup d’envoi. L’homme avait oublié sa pièce de monnaie aux vestiaires. Ça promet, le Brexit.
— Une Américaine a gagné deux fois le jackpot à la loterie, à huit ans d’intervalle, en pariant sur les mêmes numéros. Quand les lois de la probabilité sont bafouées à ce point, tout peut arriver. Le pire, le meilleur et même la fin des haricots. Mais en beauté, s’il vous plaît. But Beautiful, comme l’ont chanté Billie Holiday et Nina Simone, comme l’ont joué Chet Baker, Charles McPherson et cent autres, comme nous avons tous pu le constater :
Love is tearful, or it’s gay
It’s a problem or it’s play
It’s a heartache either way
But beautiful
Édouard Launet
Signes précurseurs de la fin du monde
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