Avec Things have changed, Bettye LaVette vient de frapper un bon coup en caressant douze titres de Bob Dylan de la plus belle des façons. Interpréter du Dylan n’est pas donné à tout le monde mais la chanteuse est justement une pure interprète qui n’écrit pas ses chansons mais redonne une nouvelle vie à celles des autres. Née Betty Jo Haskins à Muskegon dans le Michigan, cette fille de commerçants en alcool a eu la chance de voir défiler dans le salon familial des artistes qui vous donnent la chair de poule. Les Soul Stirrers ou The Blind Boys of Mississippi passaient voir ses parents. Le blues de Dinah Washington et de Bobby Blue Bland a fait le reste. A 16 ans, son grand vœu est de faire une carrière musicale. Elle décide de changer son nom en LaVette. Elle est présentée à Johnnie Mae Matthews, un important producteur de Detroit, et enregistre un premier single qui lui ouvre les portes d’une tournée nationale en compagnie de Ben E King, Clyde McPhatter et un certain Otis Redding, lui aussi un nouveau venu. Elle signe chez Atlantic mais son deuxième disque est un flop. Elle résilie son contrat et va passer toute sa carrière à passer d’un label à l’autre.
En 2008, après sa formidable interprétation de la chanson des Who « Love Reign O’er Me » lors du Kennedy Center Honors, son mari Kevin Kiley imagine le concept de la faire chanter le British Song Book. The Beatles, The Who, Elton John, Led Zeppelin… Elle réinvente les chansons de groupes anglais inspiré par le Rythm and Blues américain. En janvier 2009, elle chante « A Change Is Gonna Come » avec Jon Bon Jovi devant Barack Obama. Elle partage aussi la scène avec Paul McCartney et Ringo Starr. Son autobiographie A woman like me paraît dans la foulée. Après une troisième nomination aux Grammy Music Awards, elle reçoit le Blues Music Award.
Fin 2016, Carol Friedman, un ami photographe, lui suggère d’enregistrer un album entier de chansons de Dylan. Il vend l’idée chez Verve Records, son premier label sérieux en trente ans. « Certains écrivent des chansons, Dylan peint des portraits, raconte des histoires. C’est plus de la prose que de la poésie. Je ne trouve pas ses mots forcément très beaux mais ils sont extrêmement logiques et réalistes », précise Bettye à propos de Things have changed. Carol Friedman décide de produire ce dixième album. Il déniche le batteur Steve Jordan, ex John Mayer’s Trio mais aussi Chuck Berry, Blues Brothers, Keith Richards, Booker T and The MG’s, Neil Young. C’est Jordan qui forme le groupe derrière Bettye LaVette. Avec l’ancien guitariste de Dylan Larry Campbell, le bassiste hors pair Pino Palladino, et le clavier Leon Pendarvis. Bettye se paie le luxe d’y joindre Keith Richards sur « Political World » et Trombone Shorty dans « What Was It You Wanted ». Les douze titres sont (bien) ficelés en trois jours tout rond, proposant un Dylan retransformé que même le prix Nobel aura du mal à renier.
Dino Di Meo
Musique
Bettye LaVette, Things have changed, Verve Label Group. Sortie le 30 mars.
0 commentaires