Daniel Vierge étant à présent incapable de lire, c’est souvent Clara qui lui lit les textes qu’il doit illustrer. Un soir qu’elle lui fait ainsi la lecture dans leur maison de Meudon, elle ressent une violente douleur au cœur et meurt subitement. Pour surmonter ce deuil, il se noie littéralement dans le travail. Un ami, Georges Dumontier l’aide à traverser cette période en l’accompagnant dans de longues promenades. Ils partent quinze jours ensemble à Londres, d’où Vierge rapportera des études de miséreux qui seront publiées dans le Monde illustré.
À présent, Daniel Vierge reprend une vie plus normale, mange au cabaret, se promène dans Meudon, dessine à nouveau en extérieur. Et un jour, ainsi que le raconte son biographe Jules de Marthold:
Comme il a installé son chevalet dans la rue pour brosser l’étude d’un coin plus particulièrement amusant et pittoresque, il entre en rapports avec une dame cousant à la fenêtre d’un rez-de-chaussée. La dame le connait bien, le peintre d’allure romantique, l’espagnol aux yeux bleus, le travailleur inlassable, qu’on voit aller et venir, la canne à la main, traînant un peu la jambe, mais alerte et souriant sous son large chapeau rond.
Et l’on cause, du moins on arrive à se comprendre, et à mesure que la fameuse étude se continue, on se dit ses chagrins, ses espoirs aussi, idylle mélancolique.
Quelques temps après, Daniel a prononcé le Oui qui lie pour la vie. Passés les jours d’orage! Une existence se révèle à lui que, depuis Clara, il ne connaissait plus, régulière et paisible; désormais, il mangera chez lui, vivra tranquille.*
Ainsi que de belles œuvres ne va-t-il pas entreprendre, en chantant, et mener à bonne fin, en chantant, cette fois des jacaras triomphantes!
(Jules de Marthold, Daniel Vierge, sa vie son œuvre, H.Floury, libraire-éditeur, 1906)
*Les Vierge quitteront Meudon pour s’installer dans une petite maison au 29, rue Gutenberg à Boulogne-sur-Seine où Daniel résidera jusqu’à sa mort en 1904.
Dès lors, Daniel Vierge va illustrer successivement: L’Espagnole, d’Émile Bergerat, 1891; La Nonne alferez, de Catarina de Erauso traduite par José María de Heredia, 1894; Le Cabaret des trois vertus, de Saint-Juirs, 1895; Les Aventures du dernier Abencérage, de François-René de Chateaubriand, 1897. Avec d’autres illustrateurs espagnols les Légendes, de Zorrilla, 1901; Le Barbier de Séville, de Beaumarchais, 1903; Colomba, de Mérimée, 1904.










Mais sa dernière grande œuvre reste encore à venir…
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