Voilà une femme qui réussit à vieillir en accord avec sa musique intimiste. Lucinda Williams, née à l’origine pour être une chanteuse country, pleure des poésies déchirantes sur une musique folk-rock frissonnante. À 63 ans, celle qui fut considérée à ses début comme le pendant féminin de Dylan, commença sa carrière musicale à New Orleans après s’être fait virer du lycée pour avoir refusé de lire The pledge of allegiance, le serment au drapeau américain. Depuis, c’est avec une voix totalement érodée qu’elle murmure des paroles provocatrices sur une musique qui puise ses influences dans le gospel et le blues. Car si Lucinda Williams appartient officiellement au catalogue country de la musique américaine, comme son compère texan Steve Earle, ce n’est qu’une excuse pour exprimer un son rock inimitable.
The ghosts of highway 20, dernier album de l’artiste, fait référence à ces voyages parsemés de motels glauques et de manque d’amour à travers les routes qui mènent du Texas à la Floride en passant par la Louisiane. C’est là qu’elle a puisé tout son talent. Cette fois, Lucinda Williams a eu besoin de plus de liberté. Pour réaliser ce double album, elle a créé son propre label, Ghosts of highway 20, qui est également le titre d’un poème de son père Miller, disparu au Jour de l’An de cette année. “Là au moins je peux mettre sur disque les morceaux à la longueur que je veux”, explique-t-elle en faisant référence à “Faith and grace” qui dure plus de 12 minutes. Mais on ne voit pas le temps passer.
Car du Lucinda Williams, ça s’écoute en boucle sans problème. Pour celui-là c’est même recommandé. L’envoûtement de chansons interprétées presque a capella, lancinantes et nues, dépouillées et émouvantes vous emportent sur ces routes qui ont marqué son enfance. Accompagnée du guitariste de jazz Bill Frisell et de Greg Leisz, également co-producteur de l’album, elle livre une reprise de “Factory” de Bruce Springsteen où il ne reste plus que les os. Et c’est très bien comme ça. De loin le meilleur album de la chanteuse depuis Car wheels on a gravel road, sorti en 1998.
Dino Di Meo
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