Qui a donc inventé les Top 5, 10 ou 100 de fin d’année ? Dès qu’arrive le mois de décembre, les critiques de tous les champs artistiques semblent irrémédiablement démangés par cette manie qui, si l’on y songe un instant, ressemble à s’y méprendre à la négation de la fonction même de critique.
On ne peut se désoler toute l’année de la portion toujours plus congrue dévolue aux critiques culturelles et faire semblant qu’une année puisse se résumer en 5 ou 10 lignes ! On ne peut militer pour que les critiques ne se résument pas aux seuls “j’aime / j’aime pas” et baisser à ce point la garde pour livrer ensuite des titres d’œuvres en face de numéros ! Qu’est-ce qui pousse donc les critiques à remplir les pages des rubriques “Culture” de listes numérotées dès lors que les sapins sont en place dans les foyers ? Faut-il seulement – et facilement – blâmer les rédac-chefs ?
La critique culturelle est affaire de subjectivité, c’est un truisme, mais cette subjectivité, si elle veut être entendue, se doit d’être objectivée, et donc s’exercer à l’aide d’une argumentation liant histoire de l’art en question, analyse, et mise en perspective. Elle doit sonder le fond et la forme, et le rapport entre l’un et l’autre. Elle doit proposer une lecture de l’œuvre qui mobilise tout l’esprit critique de son auteur. Dès lors que l’on considère que la critique est une forme de pensée, elle ne saurait être réductible à un chiffre, à un classement, car chaque œuvre n’est pas différente des autres selon un étalon de mesures objectives, mais bien par un ensemble de référents qui se combinent pour exprimer une subjectivité.
On comprendra dès lors un peu mieux pourquoi les classements de fin d’année me dérangent et, au fond, me révoltent, car ils me semblent porter en eux la négation de l’exercice critique.
Pour aller contre cette tendance, lourde à tous les sens du terme, je me suis résolu à me livrer à un exercice bien plus délicat, car radical. Toute cette semaine, sur mon compte Twitter – @Arnaud_Laporte –, je propose un Top 1 de l’année 2015, pour indiquer chaque jour l’œuvre qui m’a semblé la plus marquante, dans son champ artistique, au cours de l’année qui s’achève.
Arnaud Laporte
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