Tandis que le Lieu du design francilien est présent à la COP 21, avec des projets engagés dans l’éco-conception (1), que Ronan et Erwan Bouroullec présentent une nouvelle télévision élégante, Sérif, chez Ligne Roset Réaumur, une petite exposition à Périgueux (Dordogne) propose une pause, une réflexion avant l’invasion, fin janvier, de nouveautés du salon Maison & Objet consacré aux meubles. “Le design, c’est ?” signale immédiatement son objectif pédagogique. Les objets qui y sont présentés, conçus pour le plus grand nombre, parlent à tous. C’est la démarche collective de la commissaire Jeanne Quéheillard, critique bordelaise, du designer scénographe David Dubois et du graphiste Didier Lechenne.
En quatre étapes, comme un joli étalage, on découvre comment les designers, entre industrie et artisanat, s’emparent du progrès, des évolutions technologiques, des matériaux en constante mutation. Comment ils affinent les usages, jouent avec les images sociales et l’esthétique des ustensiles. Le téléphone raconte une sacrée histoire, de l’imposant vibraphone de Graham Bell dans les années 1870 au smartphone omniprésent mais quasi dématérialisé. Non, le siège Air Chair (1999) en plastique injecté par gaz ne vient pas de chez Ikea comme les visiteurs le pensent, il a été fabriquée chez Magis, en Italie, par le Britannique Jasper Morrison. On découvre là à quel point la “copie” dans la grande distribution brouille le rôle du créateur, l’exposition lui rend sa place. Se distinguent aussi deux autres modes de production. Avec les corbeilles en fils d’acier cintrés du studio Brichet-Ziegler, conçues en autoproduction (2015). Ou les assiettes artisanales émaillées A Tavola (2008) de Stefania di Petrillo produites à Nontron.
Du côté du “bien être” moins standardisé ou des objets “pour tous” – poivriers d’Ettore Sottsass (1989), verres et plateau Orangina (2000) de Matali Crasset, aspirateur silencieux Rowenta de Stéphane Thirouin (2014), autocuiseur Seb avec ouverture en un seul geste de Normal Studio (2015) –, là encore, le dessin et le talent des créateurs sont mis en avant. Cette démonstration débouche sur de la relation évolutive entre le designer et l’utilisateur, transformée par le numérique. Les imprimantes 3D, tout particulièrement, ouvrent de nouvelles pistes de confection collaborative et mutualisée des objets. À condition, pour maintenir l’exigence et l’inventivité, que le designer reste le meneur.
“Le design, c’est ?” ne s’arrêtera pas à Périgueux. L’exposition est le point de départ d’un livre numérique que vont développer Jeanne Quéheillard et Didier Lechenne et qui poursuivra, enrichira, avec d’autres ramifications, cette introduction au design. La télé Sérif des Bouroullec pourrait être dans cette sélection.
Anne-Marie Fèvre
(1) Espace Générations Climat, au Bourget, sur le stand de la Région Île-de-France, jeudi 10 décembre, de 10h30 à 18h30.
Agence culturelle départementale Dordogne-Périgord, exposition “Le design, c’est ?”, jusqu’au 12 décembre.
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