La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

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Chroniques
Chanson de gestes

Lâcher prise

Une fin d’après-midi tranquille à la terrasse du Café Beaubourg où tout semble se dérouler, pour une fois bénite, sans agitation, on sirote un demi qui n’a jamais été un demi et qui ici l’est encore moins. Quand soudain on aperçoit des attroupements qui ne nous disent rien qui vaillent. Des jeunes gens entourent une scène qui nous laisse coite quand, soudain, l’incroyable se produit. (Lire la suite)

Primer encuentro de Malinalli con Hernán Cortés. Códice de Diego Durán. Siglo XVI. Biblioteca Nacional, Madrid.
Le coin des traîtres, Traduction

Changer de camp

Traduttore traditore... Quels que soient l’effort, la fidélité, le talent qu’il y met, une traduction est donc toujours une “trahison” du texte original, dont il serait impossible de rendre toute la richesse… Une fois ce constat dressé, tout semble dit ou presque. Sauf si l’on entend l’expression différemment. Un traître trahit sa famille, ses amis, son amour, ses idées, son parti, sa patrie ; il change de camp. Si le traducteur est un traître, n’est-ce pas d’abord à sa propre langue ? (Lire l'article)

Munch, "Le Cri" (1893)
Sciences du fait-divers

Confins de la linguistique

“Accusé de vol par un vigile, il se met tout nu dans le magasin et hurle ‘Je te crève, sale enculé de nègre’”. L’incident s’est produit dans un magasin de sports de Toulouse. L’homme sortait de la boutique lorsqu'un agent de sécurité, qui venait de découvrir un antivol cassé, lui a demandé de revenir. Le client très aviné s’est alors emporté. Les injures et insultes sont un champ de recherche très fécond en sciences du langage. Y est consacré depuis une trentaine années un nombre croissant de colloques et d’articles savants, ainsi qu’une revue. (Lire la suite)

Francisco José de Goya y Lucientes, Nature morte à la tête de mouton © Musée du Louvre. Une chronique d'Edouard Launet
Sciences du fait-divers

Scène de ménage avec freezer

Une femme frappe son compagnon avec un steak.” C’est un dimanche après-midi morose en Louisiane, le ventilateur tourne, les marais grouillent de bruits étranges, Edith picole. Lorsqu’elle ouvre la porte du freezer pour y enfourner une nouvelle bouteille de Tequila Rose, cette femme de 47 ans s’aperçoit que son compagnon Jerry a rempli le frigo jusqu’à la gueule, au point que même une bouteille n’y entrera pas. En conséquence de quoi, Edith attrape un steak congelé et le lance de toutes ses forces sur Jerry. Il aura fallu plus d’un demi-siècle pour que l’attaque à la viande congelée passe de la fiction à la réalité. (Lire l'article)

Ordonnances littéraires

Une partie d’échecs avec mon grand-père, pour Pinocchio

Au paroxysme de l’été caniculaire, le service de médecine littéraire reste ouvert et reçoit cette semaine un patient bien embêté par son état, Pinocchio, qui, à force de mentir, ne passe plus les portes. Pour traiter les symptômes et faire en sorte qu’il fasse de sa maladie chronique une force, nous lui avons administré un roman étonnant, entre fiction et réalité, Une partie d’échecs avec mon grand-père de l'Argentin Ariel Magnus (Rivages, 2018, traduit de l’espagnol par Serge Mestre), au risque de nous y perdre nous-mêmes. (Lire l'article)

Henri Bergson (1878)
Chroniques avéryennes, Écrans

Droopy chez Bergson

Comprendre le rire chez Tex Avery, c'est d'abord revenir aux grands classiques. En l'occurrence Le Rire de Bergson (1900), ouvrage qui, malgré sa petite taille et son âge avancé, n'a pris d'autres rides que celles qu'impriment les zygomatiques. Bergson, qui n'est pas un rigolo, balance d'emblée une hypothèse fracassante : "Le rire, c'est du mécanique plaqué sur du vivant". Ensuite, cela se gâte, car son sens moral lui inspire qu'au fond, le rire est peut-être un signal social adressé aux marginaux en situation irrégulière pour les inciter à rentrer dans le rang. La gravité d'un Buster Keaton, ou l'apathie de Droopy, seraient-elles les figures tragiques indiquant que le rire, au fond, n'est pas si drôle ? (Lire l'article)

Sciences du fait-divers

Feu à volonté

“États-Unis : une fillette de 8 ans abattue par un garçon de 11 ans.” C’est peut-être une nouvelle forme de record, car en ajoutant l’âge de la victime à celle du tireur, on ne dépasse pas dix-neuf. Il ne s’agissait même pas ici d’un accident. La fillette jouait dehors lorsque son jeune voisin lui a demandé de voir son chiot. Elle a refusé, il a sorti une arme et tiré. Ça se passe comme ça dans le Tennessee. Chez nous, on attend généralement l’âge de la puberté avant d’arroser le voisinage à la kalachnikov. La vieille Europe n’est-elle pas le berceau de la civilisation ? (Lire la suite)

Courrier du corps

Tyler devient hardeur

Il fera à son corps tout ce qu'on lui demande. C'est le paysan perverti par lui-même, et qui se présente comme tel sur sa page : “Je suis d'Alabama, j'ai donc ce charme particulier dont vous avez tous entendu parler et j'aime m'exhiber comme vous pouvez le voir ici !” Celui qui se présente sur XTube comme Tyler Camp (pseudo 1bamaboy19) a un tel accent sudiste qu'on ne comprend à peu près rien à ce qu'il raconte. Et il parle beaucoup, tout en se masturbant, la plupart du temps, et en éjaculant à la fin : le garçon n'est pas avare. Il pratique le plan-séquence, ses films durent 20 ou 40 minutes, montage interdit, Bazin se serait joui dessus de bonheur esthétique. (Lire la suite)