La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

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Dancing is a real job, Donald
| 24 Jan 2017

Chanson de gestes – oubliés, mis au rebut, injurieux, réprimés, automatiques, de séduction – lexique muet qui dit nos nouvelles manies, nos censures corporelles, nos abandons, nos égarements…

L’entrée du couple : pas en rythme du tout, pas ensemble ! Il tient la main de Mélanija par-dessus, il ne sait pas marcher avec elle, il n’a pas le sens du rythme, on s’en doutait un peu ! Fin du discours, pouce en l’air à 4’18 ! 

Et puis ce fichu micro : on se demande où il va le mettre.

Début de la musique. 

4,20, deux mouvements de recalage des bras, par contact des mains, pour être sûr de bien se tenir. 

Petite bise d’elle de profil, elle le cache à 4’23, côté gauche, un peu de confusion des appuis ! Quart de tour vers le fond. 

Elle se dégage un peu, dos public, petit geste de la main pour recaler la robe, trop longue sans doute, geste du poignet gauche, qui se secoue à 4’27, qui glisse sur lui, main dans la main ! Elle est de dos, elle montre l’orchestre, lâche son bras, elle sait que la musique a commencé trop tôt. Appui croisé opposé droite-gauche pour lui, gauche-droite pour elle ! L’assistant aux 12 badges-lunettes entre en courant, Donald tend le micro en serrant la main de Mélanija, l’assistant aux 12 badges-lunettes l’attrape en deux-deux, regard de Mélanija sur Donald. La musique a déjà commencé, shame c’est dommage !!! 

Au ralenti, on voit bien que c’est elle qui place les mains de Donald autour de sa taille et pose la main de Donald dans son dos, puis elle pose son bras, main tendue, sur l’épaule de son gars.

La chorégraphie est anormalement simple : basique même, un pas à droite, un pas à gauche, enchaînés, collé l’un de l’autre et normalement sur la musique, et comme une voiture, marche avant marche arrière, mais en rythme.

4’42, premier tour. Raté, pas très en rythme, interprétation personnelle, serrage ferme du poignet de Mélanija par Donald, un pas à l’envers, avant la fin de la première phrase musicale, 4’49 puis coup de cheveux de Mélanija, réaction surprise de Donald, sourire, rapprochement pour papotage, bises vers 4’50.

Deuxième phrase, de face, 4’54 double step pour rester face, sourire immédiat de Donald, il continue de regarder la foule, elle se demande en se retournant ce qui se passe… On voit bien que ça papote à la fin de la deuxième phrase musicale. 

Troisième phrase, Mélanija le regarde, re-top cheveux, 5’06, puis léger éloignement, baiser de face, à la western vers 5’12, bien en vue, au moment de l’action, re-marche arrière, dans les pas – il fait des effets – je me demande qui lui a appris à danser – mal’e – dans les deux sens…

Rythmiquement, c’est toujours assez personnel – reprise des paroles, comme s’il chantait lui-même à quatre ans devant son miroir tout seul sans ses parents ? Elle s’éloigne un peu, 5’22 top cheveux, regard public pour elle, comme pour l’excuser. Tour de papotage, quelqu’un pourra me dire ce qu’ils se racontent… en labial ? 

Tour suivant, il mène la danse, enfin il le pense. Elle est très en arrière, il peu avoir l’impression de dominer mais c’est elle qui le sauve.

Tour suivant, double main de Donald, au public, pouce double 6’04, main en l’air – gauche, puis poing levé vers 6’07 sans tendre le bras. Elle glisse sa main sur la poitrine de Donald, puis fait signe aussi mais plus bas, le bras pas aussi tendu. Elle replace le bras sur la poitrine, euh non, reprend la main de Donald en lui faisant croire qu’il fait tout à 6’08.

Tour suivant, il la laisse saluer 6’13 – face pour les photos, sympa – main fixe en l’air, puis droite-gauche, pour la récompense une bise à 6’18.

Le plus saisissant est la faculté d’interprétation de Mélanija, de le suivre, aucune faute, aucun retard. Elle assure, premier coup de cheveux sur le deuxième accent musical, les syncopes, les ralentissements, les accélérations, elle écoute et même répond. Les mots sont dits dès qu’ils sont de dos, elle salue de la même manière les deux fois, main fixe puis bref mouvement droite gauche, balayage essuie-glace… Lui, il aime les poings, un peu mou, les pouces en l’air, un peu pas tendu du coude, pour en faire un peu moins. 

6’31, bras vers la coulisse, et c’est à ce moment là que la grâce, le luxe et la pornographie s’unissent. 

Voir débouler sur la scène les pires danseurs de l’univers, une image plastique pas du tout recyclable, totalement toxique et indélébile pour la planète, une insulte à l’élégance, les robes si mal portées. Des couples qui arrivent sur scène avec tous un point commun : aucun ne sait ce que représente la force et la puissance de la danse, du partage, de l’altérité, de l’autre de la rencontre… 

Ce n’est pas une danse macabre, c’est macabre ! L’univers dans une pirouette glaçante en musique !

Le bonheur du jour était ailleurs, dans le chœur uni de toutes ces femmes et ces hommes qui ont manifesté dans une véritable contre-danse démocratique… Il nous reste le Madison…

Daniel Larrieu
Chanson de gestes

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