La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

La revue culturelle critique qui fait des choix délibérés.

Critiques
Musiques, Signes précurseurs de la fin du monde

La Granvillaise

Fort discrètement, le gouvernement vient de se doter d’une Cellule d’études et de prospective des modèles disruptifs (Cepromodis) directement rattachée à Matignon. Derrière cette dénomination se cache un organisme de veille sur la collapsologie, terme désormais consacré désignant l’exploration transdisciplinaire du probable effondrement de notre civilisation industrielle, ainsi que de ses suites éventuelles. Un document diffusé par la Cepromodis auprès des préfectures, que délibéré a pu consulter, dévoile simultanément l’existence de cette cellule et la nature de ses préoccupations. (Lire l'article)

Eric Vuillard, L'Ordre du jour, Actes Sud, coll. Un endroit où aller
Livres, Ordonnances littéraires

Éric Vuillard pour les enragés du réel

L’époque est pragmatique. On aime aujourd’hui plus que tout l’efficacité pratique, on veut que les choses soient d’une utilité palpable et évidente. C’est pourquoi on a tendance à vouloir mettre au rancard ce qu’autrefois on arborait fièrement dès qu’on le pouvait : les idées, les théories. Qui maintenant sont perçues comme des pertes de temps : c’est avec le réel qu’il faut interagir, le bon gros réel, celui qui abrite les vrais gens. Le dernier ouvrage d’Éric Vuillard pourrait permettre à certains de ces de ces enragés du réel de retrouver le chemin de la fiction, de ses fulgurances, de ses beautés, de ses vérités cachées sous la surface des faits. (Lire l'article)

Sticky drama
Courrier du corps, Musiques

Vidéo musicale et vomi (comparatif)

L'idée de départ était de regarder deux vidéos musicales un peu contemporaines, pas trop flan façon Adele. On choisit donc Tame Impala et Oneohtrix Point Never pour la musique, soit respectivement le collectif Canada et l'artiste Jon Rafman pour la vidéo, même si dans ce second cas, le compositeur Daniel Lopatin a codirigé le clip. On regarde. L'œuvre de Rafman et Lopatin, Sticky Drama, titre idoine signifiant “drame collant”, ou en l'occurrence gluant, n'a pas manqué de détracteurs pour noter que c'était un peu dégoûtant, toutes ces pustules, ce pipi et ce vomi. Dans The Less I Know the Better de Canada, le personnage masculin aussi vomit, mais de la peinture, qui vient recouvrir le corps de la jeune fille, change de couleur et suggère des menstrues tartinant un entrejambe. (Lire la suite)

Livres

Une pépite au bidonville

Rue des pâquerettes, le dernier livre de Mehdi Charef, est le récit de l’arrivée en France de l’auteur-réalisateur, de son enfance dans une baraque d’un bidonville à Nanterre. Les enfants immigrés portent en eux la blessure de l’arrachement au pays d’origine, qu’ils sont obligés de soigner comme ils peuvent, puisque « le retour est un mythe. On ne s’enrichit pas, quand on est ouvrier on le reste toute sa vie ». (Lire l'article)

Danse

María Pagés enlève Carmen

Bizet et Mérimée n’auraient sans doute pas supporté qu’une vulgaire danseuse de flamenco ravisse leur créature, leur Carmen. Celle qu’ils auraient peut-être méprisée, c'est María Pagés. La chorégraphe et danseuse trafique avec cinq musiciens les mélodies de Bizet et elle arrache des mains de ses créateurs la figure emblématique de Carmen. (Lire la suite)

Kidults
Courrier du corps

The Kidults : “mascara, pourquoi ?”

L'idée formelle qui mène le burlesque des Kidults, c'est que tout se passe dans une salle de bains et que nous sommes à la place du miroir. Les sketches se déclinent en Vines de six secondes ou en formats plus longs sur Youtube. Deux couples de colocataires plus quelques guests entremêlent leurs cheveux, leurs brosses à dents et des dilemmes pataphysiques. La forme spéculaire est ultra-cohérente à l'époque. Que l'objectif de la caméra du smartphone soit notre nouveau miroir est une évidence. (Lire la suite)

Don Quichotte par Honoré
Livres, Ordonnances littéraires

Ordonnance pour le patient Jean-Vincent Placé

Cette année, Le Salon du Livre a été rebaptisé “Livre Paris”, il s’est tenu au moment où le gouvernement cherchait (il cherche d’ailleurs toujours) à imposer une “Loi travail” et après que l’Université de la Sorbonne Nouvelle est devenue “Université Sorbonne Nouvelle”. Regardez bien, ce ne sont que trois exemples parmi bien d’autres mais comment nier l’évidence : il manque des mots. On ampute, on élague. Pourquoi ? Eh bien c’est par souci de simplification. Le site du gouvernement nous apprend que la simplification est un projet porté par un Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la Réforme de l’État et de la Simplification, Jean-Vincent Placé. L'heure est venue de lui prescrire un ouvrage pas du tout simplifié, ce qui lui permettra sans doute de poursuivre avec plus d’acharnement encore sa noble tâche. (Lire l'article)

Dorothy Dix © Yanick Macdonald
Guide

Les dix commandements de Dorothy Dix

Dans un beau monologue en dix séquences, Stéphanie Jasmin fait entendre “une voix plus sombre et profonde”, celle d’une femme “qui déroule le film de sa vie comme un trop-plein qui déferle, en désordre et en un souffle”.

Tisser les racines, détail © Ana Maria Lozano
Arts plastiques, Expo

Figures du continu, Ana Maria Lozano – Les Voyageurs, épisode 3

L’installation de Ana Maria Lozano Rivera, présente aux Beaux-Arts pour l’exposition Les Voyageurs, est de celles qui met en échec le principe du face-à-face muséal. Elle n’est pas un objet proposé au regard, mais un intérieur que l’on investit. Située dans l’entrée du Palais des Beaux-arts, Tisser les racines est une pièce à trois murs, un refuge, un pli fait dans la trame de l’exposition avant même qu’elle ne se déploie. (Lire la suite)

© Marcela Bolivar, “Leda”
Chroniques scarlattiennes, Musiques

Léda sans cygne

Parmi les personnages hauts en couleurs du XXe siècle, Gabriele d'Annunzio est le plus contradictoire. Poète et guerrier, séducteur et solitaire, amateur d'art et de moteurs V12, ce héros borgne (accident d'avion) du nationalisme italien vit un peu sur la fortune de son père, davantage sur celle de ses amies, et entretient une meute de barzoïs blancs. Grand prêtre du modernisme décadent, il traite le futuriste Marinetti de “crétin phosphorescent”, et c'est sans doute pour échapper à une injure aussi géniale que Mussolini le fait enfermer dans son kitchissime Vitoriale du lac de Garde, où il meurt en 1938. Trente ans plus tôt, à l'occasion d'un concert, il avait découvert Scarlatti. (Lire l'article)

Livres, Ordonnances littéraires

Massacre des innocents pour le Président de la République

Grâce à son sang froid et à son flair médical, le docteur Rabau a pu diagnostiquer et prendre en charge M. Macon, président de la République, bien connu au service de Médecine littéraire, alors qu’il traversait un épisode aigu de diabète politique sucré. Après une intervention en urgence au palais de l’Élysée, le patient a été admis au service de Médecine littéraire et un traitement de fond a été mis en place avec la prescription du Massacre des Innocents de Marc Biancarelli (Actes Sud, 2018). Les résultats sont encourageants et l’acidité du patient a pu être révélée. La vigilance et des soins réguliers restent toutefois nécessaires. (Lire l'article)

Arts plastiques, Expo

Minerarium

Il est des œuvres qui vous engourdissent. Des œuvres froides, silencieuses, comme les mondes désertés de Giorgio De Chirico. Les grandes peintures que Maude Maris présente à la galerie Isabelle Gounod sont de cette famille. Elle construit des scènes infinies, où aucune ligne d’horizon n’interrompt la modulation des couleurs, où le temps comme l’espace semblent avoir disparu. La verticalité prime, elle encadre les épanchements et structure ce rêve de pierre. (...)

Liliana Lazar, Terre des affranchis, Babel, 2017
Le genre idéal, Livres

Roumaine humanité

Terre des affranchis de Liliana Lazar. Premier roman, écrit en français par une femme née au début des années 70 dans un village de Moldavie roumaine : “un récit policier aussi inquiétant qu’un conte” dit la quatrième de couverture. Un roman qui n’a rien à voir avec le contemporain, mais qui parle aussi de résistance et permet l’évasion. Atypique. Polar assurément. (Lire l'article)

Black is Black - Los Bravos
Musiques, Signes précurseurs de la fin du monde

Black is Black

Ceux qui sont nés dans les années 80 ont intégré dès le berceau le concept de crise. Ils ont vu le jour dans la crise, ils ont appris très vite que la crise serait leur unique horizon, ils ont été des enfants puis des adultes de la crise. Mais aujourd'hui c’est pire. Maintenant les maternités grouillent d’enfants de la fin du monde. Ces poupons-là viennent de débarquer sur une planète qui court à sa fin, ils sont programmés pour l’autodestruction, la fin du monde est leur unique horizon. (Lire l'article)