Entrons dans cette histoire par la coulisse. Je reçois le nouveau livre de Maïa Mazaurette, autrice, journaliste et chroniqueuse, qu’on lit notamment sur Le Monde et GQ.
L’essai s’articule en deux temps, Sortir du trou puis Lever la tête. Ou comment réviser notre idée de l’hétérosexualité pour envisager nos pratiques sans l’axe de la pénétration – autrement dit, arrêtons de croire qu’il n’y a que « le piston qui fait marcher la machine ». Femme qu’il faudrait combler, remplir ; rapport sexuel qui relègue les caresses à des « préliminaires ».
Maïa Mazaurette veut nous amener à envisager la pénétration différemment : non plus comme un passage obligé, d’une part ; non plus dans la distribution hétérosexuelle traditionnelle (l’homme pénétrant la femme), d’autre part.
Ouh ! Scandale ! Un rapport sans pénétration ?! Voire : un homme hétérosexuel pénétré par une femme ??!! Si vous vouliez de l’action, installez-vous confortablement, ça va tirer dans tous les coins.
Bazouka et snipers
Suite à la publication de son essai bicéphale, Maïa Mazaurette embraye sur les réseaux avec une vidéo face caméra chez Brut dans laquelle elle démontre la simplification du sexe de la femme dans notre société, sa réduction à l’état de trou.
Très vue et très commentée, cette vidéo engendre des propos d’une grande violence. Habitués aux bastons en général et aux clashs antiféministes en particulier, les twittos contradicteurs sortent sans sommation le bazouka – snipers planqués derrière leurs pseudos.
Quelques dizaines de signes suffisent à ces hommes (en majorité) pour insulter, accuser, dézinguer (on comprend alors pourquoi Maïa Mazaurette travaille sous pseudonyme).
Plus grand public et moins connaisseur de ces sujets, le peuple de Facebook qui commente les propos de la sexperte compte, lui, de nombreuses femmes énervées.
Soit l’insulte fuse, dans toute sa simplicité, soit Mazaurette est attaquée sur la qualité de son propos – généralement sans argument et par des internautes qui estiment que « sa va, t’es conneries de féministes ».
Plutôt que de traiter la chroniqueuse de « sac à foutre », on aurait pu dire, Oh, Dieu ! bien des choses en somme.
- Agressif : « Moi, madame, si je ne pouvais pénétrer Il faudrait sur-le-champ que je me l’amputasse ! »
- Amical : « Mais l’homme s’il veut être homme doit pouvoir tremper son membre dans une chagasse ! »
- Descriptif : « C’est un membre !… c’est un zob !… c’est une trique ! Que dis-je, c’est une trique ? … C’est une cornicule ! »
On aurait pu aussi lire la littérature en question. Ou dire qu’on n’est pas d’accord. Ou ne rien dire et passer son chemin. Ne pas transformer la Toile en mur de vieille pissotière dégueulasse était également une option.
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